Diner branché en Chine

Les restaurants occidentaux avec des terrasses panoramiques en plein centre historique font un tabac dans la Chine du 21e siècle. 

Mr & M Bund Shanghai

Le nouveau restaurant pékinois M Capital a pignon sur rue. On y boit une coupe de champagne sur la terrasse avec une vue imprenable sur le mausolée de Mao et l’assemblée populaire de la République Chinoise. A la place Tiananmen, ce temple de la branchitude se situe à deux pas de la Cité Interdite. Son ambiance feutrée mi-restau-mi-boîte et son style soigné, à la française, attirent la jeunesse chinoise dorée. « Pour tout le monde, le niveau a augmenté à Pékin. Les gens préfèrent s’acheter une BMW qu’une voiture chinoise. Avec la cuisine européenne, c’est la même chose », observe Espen Harbitz, directeur général du M Restaurant Group. Le danois a déjà développé, il y a 10 ans, un même établissement à Shanghai. Le restaurant pékinois sert une cuisine européenne moderne, même décomplexée. Au lunch, le Smorrebrod est de mise ; au diner, le crémeux risotto ai funghi est enrichi de truffes de Chine. Un autre européen, le belge Yuan van Wassenhoven réalise actuellement un concept ambitieux. Le co-fondateur du Tempelhotel fait minutieusement restaurer un temple tibétain du 15e siècle à 300 m au nord de la Cité Interdite. Déjà achevés, des bâtiments richement sculptés servent d’espace de réunion, . Ce sont des salons de séminaires épurés à la sauce contemporaine dans des édifices classés. « Le but est de proposer une plateforme d’échange entre le secteur privé européen et chinois », explique cet ex-banquier nonchalant qui vit depuis 1990 en Chine. Conçue grâce à l’investissement de 10 actionnaires, cette cité silencieuse proposera également 8 chambres d’hôtel sous les toits en pagodes. Le restaurant a ouvert récemment dans l’ancienne salle de prière qui se veut maintenant très épurée. Le silence religieux y regne. L’ambiance est un brin snob. Le saumon fumé noyé dans un velouté de Chou-fleur se déguste sous les yeux trop attentifs du personnel chinois. Plus décontracté, un arrêt à « The Schoolhouse » s’impose lors d’une visite de la Grande Muraille. Les plats – un minestrone version ratatouille, des Working Man Noddles ou des Mushroom Ravioli – ne sont pas révolutionnaires, mais le concept dans une ancienne école d’un petit village en pleine campagne reflète la vie quotdienne du chinois moyen.

A Shanghai, le chef cuisinier français Paul Pairet fait un tabac. Même Bill Clinton a diné, le 13 novembre dernier, à une des grandes tables rondes chez « Mr. and Mrs Bund », donc au Bund avec vue sur le Huangpu et la silhouette des gratte-ciels de Pudong. Clinton a savouré ce panorama et l’ambiance glamour en compagnie d’un Montagne Saint-Emilion, Château Roc de Chalon 2006, fruité et corsé.

La Brasserie est remplie d’expatriés. Quatre blondes discutent en anglais ; des hommes en chemise à carreaux parlent d’affaire. Les chinois y viennent diner à leur heure habituelle vers 18h30 ou à partir d’onze heures du soir lorsqu’ « Mr. and Mrs Bund » propose un menu à 150 yuans (environ 18 Euros). La brigade en cuisine de 25 à 35 personnes est capable d’assumer une carte Brasserie française, proposant 274 plats. Cela va du Cassoulet à la Pasta au foie gras, du caviar au poulet à la mayonnaise truffée. On peut également choisir une simple salade, des sashimis, du tartare ou couronner la soirée avec l’impressionnante Crevette Tigre Fraiche, généralement de la mer de Chine du sud, cuite à la vapeur à l’intérieur d’un bocal en verre. C’est la plus ancienne des créations de Paul Pairet (PP) qui surprend également avec son « Lemon & Lemon Tart PP », présentant en vedette un succulent citron confit pendant 72 heures. « Il y a des gens qui viennent trois fois par semaine, parce que c’est comme une cantine », explique Paul Pairet. Pourtant, le ticket moyen tourne autour de 600 yuans (environ 71 Euros). Le frenchy au franc-parler engendre actuellement un autre projet, plus trendy encore: d’ici peu, par soirée, que 10 personne ne pourront déguster une dizaine de plats, synchronisés à la musique et aux images qui défilent sur les murs de « l’ultraviolet » dont le client de dispose pas de l’adresse. Il est emmené en taxi dans un quartier populaire de Shanghai ou il pénétre dans une arrière-cour afin de se retrouver devant une grille. Une porte s’ouvre, une autre se ferme. Mise en bouche au bar. Tout est gris. Mi-restaurant mi-boite, ce couloir culinaire change la sensation des goûts.

Egalement à Shanghai, mais face au Bund, le Shook se vante avec sa superbe terrasse et réunit la cuisine occidentale, thaïlandaise, malaysienne, japonaise et chinoise dans l’ancienne annexe du Peace Hotel, reprise et rénovée par le groupe Swatch. Deux étages y sont destinés aux artistes ; un autre héberge de belles salles de réunion. Le restaurant vient d’ouvrir. A ne pas rater : la salade de poulet très rafraichissante, le confit de saumon à cuisson lent et, pour la frime, un kir royal avec la liqueur en bulle sur la terrasse, accompagnée de la musique techno.

Publié dans COMMERCE INTERNATIONAL, Paris, édition janvier 2012

Photo: Mr & Mrs Bund, Shanghai